Quantcast
Channel: L'illustré - Suisse Romande
Viewing all articles
Browse latest Browse all 1064

«Tiny house», la vie en tout petit

$
0
0
Blaise Kormann
Jennifer Purro et ses animaux devant la «tiny house». L’été prochain, la jeune femme compte aménager davantage la terrasse et ainsi passer le plus de temps possible à l’extérieur.
Habitat

Vivre dans 13 m2: c’est le choix d’une jeune Romande, qui a emménagé dans une «tiny house». Tendance aux USA ou en France, le concept séduit, mais ses adeptes peinent à trouver un emplacement. Visite microscopique.

 

«Voilà, nous sommes arrivés. Les ânes, juste là, ce sont mes voisins.» Dans la campagne fribourgeoise, Jennifer Purro, 29 ans, petit bout de femme aux grands yeux verts, nous accueille tout sourire. L’assistante en soins, aujourd’hui en formation pour devenir conductrice de bus, rappelle ses chiens. Derrière elle, son micro­paradis: une tiny house («maison minuscule»), la version branchée du mobile home. Toute clinquante, en cèdre rouge, avec sa porte et ses fenêtres minuscules, la maisonnette de 6 mètres de long pour 3,5 mètres de haut semble avoir été déposée dans le joli verger durant la nuit. Le jardin n’est pas encore fleuri, la pelouse pas semée. «J’ai emménagé la semaine passée, s’excuse Jennifer, tout n’est pas terminé.»

Alors, c’est comment de vivre dans une toute petite maison? C’est tout d’abord un grand défi: réussir à caser le contenu du deux pièces et demie d’alors dans les 13 mètres carrés d’aujourd’hui. Il a donc fallu trier, trier, et encore trier. A l’arrivée, Jennifer parle pourtant d’un «soulagement». Délestée d’un grand nombre d’objets qu’elle n’avait pas ressortis de ses tiroirs depuis des années, elle se sent désormais «légère». «Bon, pour les chaussures, je me suis quand même demandé comment j’allais tout rentrer dans la tiny», rigole la jeune femme, qui concède en avoir stocké quelques paires chez sa mère. Pour le reste, elle l’a donné. «Mais je tenais beaucoup à conserver une commode appartenant à ma grand-mère, et j’ai réussi à l’intégrer dans ma cuisine», souligne-t-elle fièrement.

tinyhouse2_0.jpg
Depuis son lit en hauteur, Jennifer Purro a la vue sur sa cuisine. Attention à la tête, tout de même! Photo: Blaise Kormann

Dans la tiny house, tout est donc prévu au millimètre: une cuisine avec deux petites plaques et un évier qui se transforme en plan de travail, un petit canapé pour elle, un autre pour les chiens, une mezzanine avec matelas deux places. La salle de bain est spartiate: des toilettes sèches alimentées avec de la litière pour chevaux (une sorte de sciure), une douche et une petite fenêtre. Les escaliers ont été supprimés au profit d’une échelle rabattable et même Sam, le chat, semble être calibré pour dormir entre l’armoire et le plafond.

Plus qu’une caravane

Pour s’offrir son petit bijou, Jennifer a puisé dans ses économies et déboursé 48 000 francs: «L’investissement vaut la peine, c’est plus qu’une caravane. L’isolation est en fibre de lin et il y a un double vitrage. C’est donc bien isolé et presque aussi résistant qu’une maison traditionnelle», estime Jennifer.

Restait encore à trouver un emplacement. Alors que certains, surtout en France, tractent leur tiny house derrière leur voiture au gré de leurs envies, la jeune femme a choisi d’implanter la sienne au même endroit, au moins durant quelques années. Des connaissances ayant eu vent de son projet lui ont spontanément proposé un terrain pour elle et sa maisonnette, contre un loyer d’environ 300 francs par mois.

tinyhouse3.jpg
A gauche, l'espace salle de bain et les toilettes sèches. On ne voit pas la douche, mais il y en a une! A droite, Jennifer Purro mijote un repas dans sa cuisine. Une fois la table réorientée, elle assure pouvoir recevoir jusqu’à six personnes. Photos: Blaise Kormann

En cette belle journée d’été, sur le banc accolé à la tiny house, en compagnie de ses chiens Joy et Trevor, Jennifer contemple la campagne. Seul le tintement des cloches vient troubler la quiétude des lieux. Tout est parfait pour la jeune femme, qui explique pourquoi elle a choisi ce mode de vie. Proche de la nature depuis son enfance, Jennifer s’est toujours préoccupée de l’environnement. Elle achète de la nourriture en vrac, mange moins de viande, s’achète peu d’habits, recycle. «Même mes animaux, c’est de la récup, ils viennent d’un refuge, sourit-elle. C’est un tout, je cherche à vivre mieux avec moins et à m’éloigner de la société de consommation, sans tomber dans une attitude extrémiste.» Alors, forcément, dans sa tiny, pas de télé. Le soir, elle contemple les étoiles depuis la lucarne de sa mezzanine.

Vivre ainsi peut sembler idyllique, mais Jennifer le dit, tout n’est pas rose. «Je crois que tout le monde ne pourrait pas s’adapter. Je n’ai pas de four et parfois l’eau est froide.» Mais la jeune femme prend cette nouvelle vie comme un défi, une étape. Le fait de ne pas être en possession d’une autorisation officielle de stationner ne la stresse pas particulièrement: «Je fais confiance à l’ouverture d’esprit des gens. J’irai où le vent me porte et peut-être qu’un jour je changerai de mode de vie.» Pour Jennifer, il est par exemple inenvisageable de vivre ainsi avec des bambins. «Dans une tiny, tu ne peux pas dire à tes enfants de filer dans leur chambre», rigole-t-elle. Plus qu’un choix de vie définitif, Jennifer évoque plutôt une expérience hors norme «suscitant le débat», qui a l’avantage de la rapprocher de ses deux passions: la nature et les animaux.


«Tiny house», mode d’emploi

1. Où peut-on installer sa «tiny house»?

Une tiny house, généralement montée sur un châssis de remorque, doit être parquée dans une zone habitable et nécessite un permis de construire ou, pour les installations temporaires, une autorisation de stationnement. Ceux qui ne possèdent pas de terrain devront trouver un propriétaire disposé à leur louer un emplacement. Prudence car, en Suisse, l’obtention d’autorisation pour ce genre d’habitation est un parcours semé d’embûches. «A Genève, c’est une compétence cantonale; ailleurs en Suisse romande, chaque commune a un règlement d’urbanisme qui précise les règles cantonales et fédérales, explique Monique Ruzicka-Rossier, architecte-urbaniste et chargée de cours à l’EPFL. Certaines communes sont plus sourcilleuses que d’autres, mais toute personne qui ne respecte pas les règles en vigueur s’expose à des ennuis.» Avant d’investir dans une tiny house, il vaut donc mieux être certain de disposer d’un emplacement répondant aux critères requis. Sinon – mais c’est moins bucolique – il reste les terrains de camping.

Dès qu’un permis de construire est accordé, et pour autant que le facteur puisse y accéder sans difficulté, il est possible d’installer une boîte aux lettres.

2. Combien ça coûte?

Il faut compter entre 40 000 et 70 000 francs pour une tiny house toutes options. Les matériaux utilisés et la taille de la maisonnette feront grandement varier le coût. Ceux qui ne possèdent pas leur propre terrain devront également s’acquitter d’un loyer envers le propriétaire.

3. Quelles sont les mensurations autorisées?

L’Office fédéral des transports a classé les tiny houses dans la catégorie «caravanes». Dès lors, pour être tractée avec une voiture, une tiny house doit peser 3500 kg au maximum et ne pas mesurer plus de 6 mètres de long. Pour ceux qui auraient des envies de big tiny house, elle peut être tractée par un véhicule agricole.

4. Comment s’approvisionner en eau?

Un réservoir d’eau d’une centaine de litres permet d’être autonome. Il est aussi possible de se raccorder au système d’une habitation voisine et ainsi de négocier un forfait comprenant l’eau, l’électricité et le terrain. Pour être plus écologiques, certains récoltent l’eau de pluie. Du côté des eaux usées, le plus simple est de se raccorder au réseau d’assainissement public. Ceux qui souhaitent être totalement indépendants peuvent installer des filtres pour les eaux grises. Dans ce cas, il est impératif de n’utiliser que des produits biologiques.

5. D’où vient l’électricité?

En général, les tiny houses sont équipées d’une génératrice fonctionnant au gaz. Certains innovent en posant des panneaux solaires sur le toit de leur micromaison.

Textes: Chloé Burgat

 

Flux: 


Viewing all articles
Browse latest Browse all 1064

Trending Articles