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Mélanie Chappuis en son domaine

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Jean-Blaise Besençon
L'écrivain Mélanie Chappuis.
Tête-à-tête

Chaque semaine, «L’illustré» rencontre une artiste au coeur de l’actualité culturelle romande. Aujourd’hui, l’écrivain Mélanie Chappuis qui consacre à sa maison extraordinaire un émouvant petit roman.

A ma proposition de rencontre, Mélanie Chappuis a répondu: «Venez à la maison, puisque vous avez lu le livre!» Un thé avec mes chères fantômes, son cinquième roman, est directement inspiré par la Châtelaine Vieusseux, nom du domaine et de la maison de maître où elle habite à Genève, avec son mari, Philippe Chappuis, connu dans le monde entier sous le nom de Zep. «Jamais je ne me serais attendue à vivre dans une maison comme celle-ci. Elle est sublime, mais quand même un peu intimidante. Je me suis demandé: comment me sentir chez moi? Ce livre, c’est ma manière de redonner quelque chose à cet endroit extraordinaire.»

En introduction, Mélanie a confié à Anne Bruchez, une amie retrouvée après leurs études à l’Université de Fribourg, l’histoire de ce vaste domaine, dont la création remonte au XVIIe siècle. Et c’est en parcourant la liste des propriétaires successifs que Mélanie Chappuis a fait la connaissance d’Emma Vieusseux (1817-1901), qu’elle invite à partager une tasse de thé vert à l’ombre du même vénérable platane sous lequel nous sommes assis. «Cette femme a vécu totalement enfermée dans son rôle de grande bourgeoise; mais elle était artiste. Elle a écrit des livres qui sont du niveau de ceux de Guy de Pourtalès. Et elle a osé refuser le mariage, mais elle dit des choses magnifiques sur la vie de couple ou la peur d’aimer trop son enfant, elle décrit très bien ces sentiments. Et puis elle dessinait admirablement…» L’actuelle maîtresse de maison a glissé dans son livre quelques-uns de ses magnifiques dessins réalisés dans la propriété et aussi quelques aquarelles de Zep pour la touche de couleur.

En faisant le tour du quartier, Mélanie Chappuis a emprunté le chemin Michée-Chauderon, hommage à la dernière femme exécutée à Genève en 1652 sous l’accusation de sorcellerie. Elle était plus simplement blanchisseuse et pratiquait la médecine naturelle. Mélanie imagine alors que la malheureuse venait cueillir des herbes le long du Rhône qui coule en bas de la propriété. Elle lui prête sa plume, qui lui dicte les pages parmi les plus fortes du livre. «J’étais presque en écriture automatique.» Et quand «la sorcière» évoque son supplice ou s’adresse à son fils mort qu’elle va bientôt rejoindre, des phrases brûlantes de sensualité et de feu: «Mon Dieu, et pourquoi le Diable existerait quand toi tu existes si peu?»

Pour finir, Mélanie Chappuis s’adresse directement à sa «chère maison»: «Avant toi, mon lieu de domicile était secondaire… Aujourd’hui je suis celle qui t’habite et il me reste souvent à vouloir te mériter… J’ai commencé par fouiller tes entrailles. Je te rends une partie de ta mémoire avant de poursuivre notre histoire.»

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Un thé avec mes chères fantômes, Ed. Encre fraîche.

 

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