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Mireille Darc racontée par ses proches

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Getty Images
Malgré de graves ennuis de santé depuis l’enfance, Mireille Darc, ici en 1966 sur le tournage du film «A belles dents», accéda au rang de star du cinéma.
Hommage

Icône du cinéma français, l’actrice née Mireille Aigroz 
d’un père vaudois s’est éteinte à 79 ans après un double AVC. Témoignages de ses proches.

Il est des femmes qui traversent les époques et les épreuves; la comédienne franco-suisse Mireille Darc, disparue lundi dernier à 79 ans, était de cette trempe-là. «Elle était très forte et fragile à la fois.» A Paris, le producteur Norbert Saada évoque avec émotion cette amie dont il produit La barbare en 1989, son premier film en tant que réalisatrice. «Mireille était dans le coma depuis trois jours», confie-t-il. Après deux AVC en septembre dernier, elle semblait tirée d’affaire. Son mari, Pascal Desprez, avait témoigné, confiant, peu après le drame. «Elle avait commencé à avoir mal à la tête. Elle a fait une hémorragie cérébrale, puis une deuxième. Il y a eu un grand moment de panique.» Sortie d’un coma artificiel, l’actrice en phase de rééducation avait fini par récupérer la marche et la parole à 90%.

Colonne 
vertébrale fracturée

Une fois encore ce petit brin de femme, attachante, libre et sexy, s’en sortait miraculeusement. Mireille Darc était une survivante. Après un terrible accident de voiture le 7 juillet 1983 dans le val d’Aoste – elle avait subi une fracture de la colonne vertébrale – elle fut soignée à l’hôpital de Genève.


«Mireille Darc ne s’est jamais démodée», dit le photographe Richard Melloul. Ici, l’actrice arpente une plage avec son chien, en 1982. Elle qui se considérait plate, un peu comme Birkin, n’a aucun souci à laisser son sein gauche prendre le soleil. Photo: Getty Images

Depuis l’enfance, elle souffrait d’un souffle au cœur. En 1980, Mireille Darc avait été opérée à deux reprises. Le professeur Christian Cabrol lui avait implanté une valve lors d’une opération à cœur ouvert. En 2013, opérée une seconde fois, elle semblait avoir surmonté le pire.

En 2015, on apprenait dans l’émission de Marc-Olivier Fogiel, Le divan, que son père avait tenté de se suicider sous ses yeux. «C’est à cause de toi», dit-il à la fillette âgée de 6 ou 7 ans. Enfant illégitime, il la surnommait la «bâtarde». Son véritable père était un marin de passage à Toulon. A chaque coup du sort, celle qui était née Mireille Aigroz, originaire de Combremont-le-Petit, dans le canton de Vaud, montrait un courage admirable.

A Genève, elle cultivait une réelle amitié avec l’avocat Dominique Warluzel. «C’était ma grande sœur, pleure l’ex-ténor du barreau joint par téléphone. Un jour de 1989, Alain Delon, dont je gérais toutes les affaires, m’a dit: «Je vais vous envoyer une femme exceptionnelle.» Elle m’avait offert une grande photo d’elle. Depuis lors, ce fut une sororité de cœur et d’esprit. Elle était d’une fidélité intangible, inconditionnelle. Jamais je ne l’ai entendue se plaindre malgré un accident de voiture, deux remplacements de valves cardiaques et un cancer. Jamais!»

Une «mère» pour 
Anthony Delon

Ses ennuis de santé avaient empêché Mireille Darc d’enfanter. Anthony Delon, fils aîné d’Alain et de Nathalie Delon, la considérait comme sa propre mère. «Elle a élevé Anthony pendant quinze ans, confie l’avocat. C’est lui qui m’a prévenu en me disant qu’il fallait que je m’attende au pire.»

Généreuse et attentionnée, ces deux adjectifs la définissaient pleinement, confirme le photographe français Richard Melloul. «Mireille pensait d’abord aux autres avant de penser à elle, c’est rare dans ce métier. C’est une femme des années 70, mais terriblement d’aujourd’hui. Elle ne s’est pas démodée. Avec Mireille, nous avons fait deux livres sur Maurice Béjart, réalisé des reportages et des documentaires. J’étais à son chevet il y a encore trois jours», ajoute-t-il.


Mireille Darc avec des hommes qui ont compté pour elle: (de g. à dr.) son mari, l'architecte Pascal Desprez, Alain Delon bien sûr et l'avocat genevois Dominique Warluzel, qui la considérait comme sa "grande soeur". Photos: Richard Melloul, Bureau 233/Jean-Pierre Bonnotte, Gamma-Rapho/Sipa

Avant sa reconversion derrière la caméra, Mireille Darc fut pour le grand public l’apparition glamour de la comédie de l’année 1972, Le grand blond avec une chaussure noire. Un choc inoubliable pour Pierre Richard. De passage à Crans-Montana, il s’en est souvenu avec ravissement en 2013: «Mireille Darc, la première fois que je l’ai vue, elle avait le dos nu jusqu’aux fesses! On m’avait caché Mireille Darc et la fameuse robe fendue dans le bas du dos… Le réalisateur, Yves Robert, s’était débrouillé pour que je ne la voie pas. En ouvrant la porte, j’en ai eu le souffle coupé!» La scène a été tournée telle quelle. L’actrice au cœur si fragile avait connu le grand amour pendant quinze ans avec Alain Delon.

Elle avait accepté de lui rendre hommage en novembre 2015 pour fêter ses 80 ans. «Lorsque je l’ai rencontré la première fois, il était trop, disait-elle. Trop beau, trop doué. Il avait un magnétisme très fort. Au début, sa beauté m’avait fait peur. Je n’ai pas été séduite tout de suite par lui, mais intéressée», nous confiait-elle d’une voix bienveillante malgré une séparation qui laissa des traces profondes. «Il y a un moment où on laisse de l’espace, et si quelqu’un s’y met, ça chavire», admettait-elle. La jeune Anne Parillaud ne résista pas à Delon. «Ensuite, chacun a fait son bout de chemin, même si on se rend compte que c’était peut-être mieux avant…» Son désir d’enfant fut impossible à combler. «Je n’ai jamais caché à Alain que je ne pouvais pas en avoir. Il le savait. Il était à la recherche d’une femme qui puisse lui en donner encore.»

 


Mireille Darc et Alain semblaient inséparables, unis par leurs blessures d’enfance respectives. Lui, le fauve magnétique, elle, la fille farouche puis fascinée. C’est elle qui éleva Anthony Delon, fils d’Alain et de Nathalie, pendant quinze ans. Photo: AFP

A Pascal Desprez, mari de Mireille Darc depuis 2002, Alain Delon dit un jour: «Je vous la confie.» Le Guépard avait pu, lui aussi, compter sur Mimi Jolie, comme il la surnommait tendrement. Un matin de 1968, il fut soupçonné d’avoir commandité l’assassinat de Stefan Markovic, son ex-garde du corps, retrouvé mort dans une décharge publique. La presse et l’opinion avaient condamné Delon. Il appela Mireille Darc et elle répondit présente, comme toujours. «L’affaire Markovic commençait. Soudain, les gens ignoraient Alain, dit-elle. D’un seul coup, partout où il allait, on refusait de lui parler. Tous avaient peur d’être compromis.» Delon décida de faire face. Alors que la rumeur de son arrestation enflait, il se rendit un soir à l’opéra voir danser Rudolf Noureev. Elle en gardait un souvenir palpable. «On s’est retrouvés, lui et moi, à l’opéra, très seuls. Il y avait le Tout-Paris et le Tout-Paris hostile nous ignorait. Ce soir-là, ça m’a rapprochée d’Alain.» Le couple fit face au soupçon pendant deux ans. «Cela nous a vraiment unis. On était alliés», dit-elle.

A Genève au théâtre

A Paris puis à Genève, en 2007, Alain Delon et Mireille Darc s’étaient retrouvés flamboyants au théâtre dans la pièce Sur la route de Madison. Au Théâtre du Léman, elle était apparue dans l’une des scènes complètement nue, de dos, devant une assistance subjuguée.


Des années après leur rupture, Mireille Darc retrouva Alain Delon comme au premier jour dans la pièce de théâtre «Sur la route de Madison» qui fit escale, en 2007, à Genève. On retrouve ici les deux acteurs sur le plateau de «Vivement Dimanche», l’émission animée par Michel Drucker. Photo: Angelil/Dukas

 

Delon semblait fou d’elle. «C’est une femme exceptionnelle! Vous avez vu ce corps? Les spectatrices viennent me voir après la représentation et me disent: «Elle est magnifique pour ses 55 ans.» Je leur dis: «Oui, tout à fait, et vous pouvez en rajouter 15 de plus.» Mireille Aigroz avait choisi le pseudonyme Darc en montant à Paris afin de faire carrière, pensant à Jeanne d’Arc et à la rivière de son enfance, l’Arc. Elle a été l’égérie du réalisateur Georges Lautner. Elle enchaîna les comédies. A partir de 2005, Mireille Darc était devenue la marraine de l’association humanitaire La chaîne de l’espoir. Elle a pour mission de permettre aux enfants des pays en voie de développement d’avoir accès aux soins médicaux et chirurgicaux et à l’éducation scolaire. 

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