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Marc Voltenauer, 
passion polar et vie privée

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Darrin Vanselow
Roman en main, Benjamin et Marc Voltenauer relisent un passage de «Qui a tué Heidi?» sur la rivière de l’Avançon, près du Miroir de l’Argentine, où sera retrouvé le cadavre d’une femme.
Rencontre

Le Genevois sort le deuxième volet des aventures 
de son héros, l’inspecteur homo Andreas Auer.
Sa vocation récente pour le roman policier a bousculé son existence et celle de son compagnon, Benjamin. Rencontre.

Retrouver l’auteur de polars genevois Marc Voltenauer, 44 ans, à Solalex, au pied du Miroir de l’Argentine, sur la terrasse de l’auberge familiale des Jaggi, c’est pénétrer à la page 315 de son nouveau roman policier intitulé Qui a tué Heidi?. Le héros, l’inspecteur homosexuel Andreas Auer, y est attablé en compagnie de Mikaël, son amant. Ce jour-là, l’auteur, lui, est venu avec Benjamin, 31 ans, compagnon de vie à qui il dédie le deuxième ouvrage de sa jeune carrière d’écrivain. Lucien, le serveur facétieux décrit au chapitre 92 se matérialise sous nos yeux. Il dessine au feutre chacun des plats qu’il commente. Le décor en arrière-plan est spectaculaire. Au cœur des Alpes vaudoises, la paroi montagneuse de calcaire est lisse et brillante. Voltenauer est tombé amoureux de la région, découverte grâce à celui qui partage son intimité. Ce soutien de tous les instants a été le témoin depuis quelques années d’une passion naissante couronnée de succès.

A deux autour du monde

«Il existe des ponts entre réalité et fiction, ma vie avec Benjamin et mes livres, dit Marc Voltenauer. Si j’ai ressenti l’envie de faire évoluer mes personnages à Gryon, c’est grâce à un coup de cœur. Benjamin est originaire de la région, il me l’a fait découvrir.»

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Chez lui, à Sugiez (FR), Marc Voltenauer relit les épreuves de son ouvrage. Il aime aussi écrire au Café Pomme, à Gryon, un des lieux clés de ses romans. Photo: Darrin Vanselow

La paisible commune vaudoise, théâtre de son premier ouvrage, Le dragon du Muveran, était bousculée par les crimes d’un tueur en série. On la retrouve, même si l’action, cette fois, évolue ailleurs en Suisse romande et jusqu’à Berlin.Pour Marc Voltenauer, l’envie d’écrire ne s’est jamais véritablement manifestée comme telle. Elle a germé au cours de son voyage autour du monde entre 2011 et 2012 pour éclore au retour. Marc et Benjamin ont quitté leurs emplois respectifs et largué les amarres après avoir économisé pendant deux ans. «Le fait de dessiner les contours de notre périple, de démissionner, de lâcher notre appart, de découvrir ensemble des pays, des cultures, des êtres, des lieux, des atmosphères a été très important dans notre histoire personnelle. Nous avions beaucoup de temps à disposition, sans aucune pression. Cela nous a permis de nous libérer de plein de choses sans avoir à nous préoccuper de ce que nous ferions après», commente Marc.

Echafauder une intrigue

Benjamin et lui ont consacré énormément de temps à lire entre la Jordanie, l’Inde, l’Asie du Sud-Est, l’Australie, la Nouvelle-Zélande, la Nouvelle-Calédonie et les grands espaces d’Amérique du Nord. «Benjamin est plus éclectique. Moi, c’était polar uniquement», précise Marc Voltenauer. Au fil des lectures, cet ancien responsable des ressources humaines d’une banque genevoise commence à percer l’architecture des thrillers nordiques signés Camilla Läckberg, Henning Mankell ou Jo Nesbø.

«Au retour, je me suis dit, de façon inconsciente: «Ça doit être sympa d’échafauder une intrigue.» Benjamin se souvient: «Il y avait chez Marc un challenge à relever: «Est-ce que je serai capable d’écrire un roman?» Un matin, il le vit se mettre au travail à 4 heures, tenaillé par «le besoin de raconter l’histoire qu’il avait en tête».Le village de Gryon, avec sa topographie insolite, était à ses yeux le pendant romand des lieux où se déroulaient les huis clos des auteurs scandinaves.

L’envie de raconter

Tout s’est enchaîné rapidement. Une réflexion de Camilla Läckberg, jamais avare en conseils sur son site officiel, lui revient: «Ecrire un polar, dit-elle, tout le monde peut le faire. Il faut 10% d’inspiration et 90% de transpiration.» Ce que Marc Voltenauer va éprouver, malgré les embûches, avec une relative facilité. «Les idées venaient de façon très naturelle, j’étais surpris. A l’école, le français n’a jamais été mon point fort. C’est l’envie de raconter qui a pris le dessus.»
Pour relire ses premiers jets, guider ses pas, il a pu compter sur l’aide précieuse de Benjamin, de sa propre mère d’origine suédoise – elle a sélectionné pour Marc la crème des polars lus en voyage – et de Marie Javet, auteure de La petite fille dans le miroir.

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Benjamin et Marc dégustent, au restaurant du Miroir de l’Argentine, une glace à l’aspérule (vanille sauvage), tout comme le héros, Andreas, et son amant, Mikaël, dans «Qui a tué Heidi?». Photo: Darrin Vanselow

Qui a tué Heidi?, avec ses 445 pages, est plus copieux que le précédent. Sa trame est déroutante, du moins au début. Quel est le lien entre un tueur à gages russe en mission à Berlin, un individu à la personnalité trouble surnommé L’homme qui s’enivrait du parfum de sa mère et un paysan vaudois?

Les caractères sont en proie à des interrogations. Erica Ferrand, la femme pasteur croisée dans Le dragon du Muveran, est tenaillée par un sentiment de culpabilité. L’inspecteur Andreas Auer ne fait pas exception. «J’ai l’air d’un con», se dit-il dès le prologue.A travers 140 courts chapitres, il compose avec un soin maniaque un récit fictif nourri des connaissances professionnelles de spécialistes romands. «J’ai consulté un directeur de prison, un inspecteur, un commissaire, un avocat et un médecin légiste, le fameux professeur Patrice Mangin.»A ce dernier, il demande: «Comment peut-on faire croire au suicide d’une personne alors qu’il s’agit d’un meurtre?» Le spécialiste, ne connaissant pas encore l’écrivain, s’est assuré, avant de lui répondre, que son interlocuteur ne cherchait pas à commettre un crime parfait.

Un succès inattendu
Avec la parution du Dragon du Muveran – 30 000 exemplaires vendus et une parution à venir en poche – l’auteur a vécu, en couple, l’inattendu. «C’est devenu une aventure à deux, confie Benjamin. Une dynamique s’est créée dès la réponse favorable d’un éditeur. Les romans de Marc sont très présents dans notre vie.»

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Voltenauer se détend à l’alpage de Frience. C’est ici, selon lui, que vivait le meurtrier de son premier roman. Photo: Darrin Vanselow

Au moment de commencer à rédiger, Voltenauer venait de décrocher un nouveau poste à plein temps dans la pharma. Benjamin, lui, est actif dans le tourisme. Il fallait assurer, en plus, tout ce qui allait arriver. A deux, ils ont découvert le microcosme littéraire romand, la promotion, les médias, l’efficacité des réseaux sociaux et le succès, inattendu, avec le prix SPG 2016 et un projet d’adaptation au cinéma avec CAB Productions. «Benjamin est très doué dans la communication et le marketing, ça nous a occupés tous les deux», ajoute Voltenauer. A quelques jours de la sortie de Qui a tué Heidi? (Ed. Slatkine & Cie), le 25 août, un sentiment domine. «J’ai une petite appréhension. J’espère que les lecteurs vont partager mon plaisir.» Ils ne seront pas déçus.

Et l’auteur de conclure en pensant avec tendresse à Benjamin: «Ecrire est un élément central de notre vie, mais le plus important, c’est nous deux!»

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