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Denis Zakaria: le surdoué du foot

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Gian Marco Castelberg/13Photo
Denis Zakaria a commencé le foot à 6 ans, au Servette.
Sport

Ancien de Servette puis de Young Boys, le Genevois de 20 ans a illuminé de sa classe l’équipe de Suisse, qui s’est qualifiée dimanche contre l’Irlande du Nord pour la Coupe du monde en Russie, l’année prochaine.

«Il avait à peine 5 ou 6 ans et il voulait absolument jouer au Servette, se rappelle sa maman, Rina Zakaria. Il a fait des tests et ils l’ont accepté. Je travaillais la journée et je préférais qu’il joue au foot plutôt qu’il traîne dans la rue. Mais le football, pour moi, c’était juste un jeu et j’ai encore de la peine à réaliser que c’est devenu son métier.»

Rina Zakaria ne connaît pas vraiment le foot, mais elle est fière de son fils Denis, 20 ans, grand gaillard sympathique et souriant dans la vie quotidienne, mais défenseur intraitable sur le terrain, qui vient de sortir deux grands matchs contre l’Irlande, jeudi 9 novembre à Belfast et dimanche 12 novembre à Bâle, contribuant à la qualification de l’équipe de Suisse pour la Coupe du monde, l’année prochaine en Russie. «Il est toujours correct, toujours de bonne humeur», dit sa maman.

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Denis Zakaria à 10 ans, avec ce ballon autour duquel tourne déjà sa vie. Photo: DR

Le clan des Zakaria
Une passion et un don pour le foot, une grande famille soudée, une éducation fondée sur le travail et la discipline… Denis Zakaria est né à Genève, comme son grand frère Richard, son aîné de trois ans. Ils ont aussi une grande sœur, Bidour, 37 ans, et un cousin, Emmanuel, qui vit avec eux. «Je suis originaire du Sud-Soudan, explique Rina Zakaria. Quand je suis arrivée à Genève en 1983, je ne connaissais personne, je ne parlais pas français, je n’avais pas d’argent. Ce n’était pas facile, j’ai dû me battre et j’ai toujours dit à mes enfants qu’il fallait faire des efforts. J’ai été une mère sévère, c’est sûr… (Rire.)»

Sud-Soudanais par sa mère, Congolais par son père qui est retourné dans son pays il y a longtemps, Denis Zakaria est un pur Genevois qui a eu la chance d’habiter au cœur de la ville. Un immeuble ancien, plein de charme mais sans ascenseur, à la place du Perron: d’un côté le Molard, à 100 mètres, en descendant; de l’autre la Treille, à 100 mètres aussi, en montant dans la Vieille-Ville. «C’est un peu l’origine de tout, reprend son frère Richard, 24 ans, qui est étudiant en droit. On allait tous les jours à la Treille pour jouer au foot avec des copains. Denis était tout petit et il se donnait à fond pour ne pas être exclu. Je crois que ça a forgé son caractère. En hiver, quand il faisait trop froid, on jouait dans l’appartement et je crois qu’on a dû faire quelques dégâts! Mais bon, il y a prescription aujourd’hui! (Rire.)»

Passion foot et force intérieure
L’école, le foot, l’école où il est bon mais pas vraiment mordu, le foot qui est sa vraie passion et qui prend de plus en plus de place… «Denis a eu la chance d’être bien entouré par sa famille et de bien choisir ses amis, remarque Michel Pont, l’ancien entraîneur assistant de l’équipe de Suisse, qui le connaît bien. Il a une vraie force intérieure, un équilibre qui fait la différence.»

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En juin 2007 avec son idole de l’époque, l’ex-Servettien Philippe Senderos, qui a organisé une journée d’entraînement au stade de la Praille pour une centaine de jeunes. Ironie de l’histoire, c’est Zakaria qui a pris la place de Senderos dans l’équipe de Suisse. Photo: DR

Enfant, Denis n’est pas le demi défensif qu’il est aujourd’hui, mais avant-centre. «C’était le buteur-né, explique Richard. Il marquait parfois dix buts pendant un match! Et puis vers 15 ans, il a été un peu trahi par son corps. Il a fait une poussée de croissance impressionnante, jusqu’à 1 m 92, et il est devenu beaucoup plus costaud, ce qui a changé ses repères et compliqué ses déplacements. Je pense d’ailleurs qu’il a gardé ses réflexes d’attaquant: il a toujours cet instinct d’aller vers l’avant. Mais le résultat, c’est qu’à 16 ans Servette ne l’a pas retenu dans le groupe des moins de 18 ans, qui est l’antichambre des pros, mais dans les M17. Il s’est senti mis à l’écart, comme quand on jouait à la Treille.»

De l’avant à l’arrière
Un passage par la case doute, qui aura été aussi une manière de tester et de renforcer sa vocation. Des entraîneurs qui le repositionnent sur le terrain, le testent dans tous les postes, le baladent ici et là… Ses modèles? Zidane, Ronaldinho et surtout Patrick Vieira – même style, même taille, même gabarit. «Il s’entraînait toujours autant, reprend Richard, et il avait la même hygiène de vie, mais il se posait des tas de questions. Il voyait ses copains qui sortaient le soir et qui faisaient la fête. Je me rappelle qu’il m’a dit un jour, à 16 ans: «J’ai l’impression de passer à côté de ma jeunesse.» Je lui ai dit: «Mais tu veux faire quoi de ta vie, à part le foot?» Il m’a répondu «Je ne sais pas», alors je lui ai dit de continuer le foot.»

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Rina Zakaria et son fils Richardavec les maillots de Denis Zakaria: celui du Servette, où il a commencé sa carrière, et celui du Borussia Mönchengladbach, où il joue aujourd’hui. Photo: Didier Martenet

Denis Zakaria ne va pas lâcher son rêve. A 17 ans, il fait enfin une première apparition avec Servette, quelques minutes à peine et sans toucher le ballon. Servette est son club de cœur, bien sûr, mais il évolue en Challenge League, très loin des meilleurs. Courtisé par de grands clubs européens, le Genevois choisit les Young Boys où il reste deux ans, l’occasion aussi d’apprendre le suisse allemand, avant de débarquer cette année à Borussia Mönchengladbach, un grand club en Bundesliga. Il joue aussi son premier match avec l’équipe de Suisse, contre la Belgique au stade de la Praille, dans son jardin donc.

«Je remercie Dieu»
Jusqu’où ira Denis Zakaria? «Mon fils s’appelle Denis Lemi, dit sa maman en souriant. Lemi, dans ma langue, ça veut dire «j’ai de la chance». Je pense aussi que j’ai eu de la chance, je suis chrétienne et je remercie Dieu pour ce qu’il m’a donné. Mes enfants sont sérieux, ils sont travailleurs. Je les ai toujours poussés à étudier et à aller le plus loin possible. Quand Denis a arrêté l’école de commerce pour être professionnel au Servette, j’étais inquiète. Mais je suis très contente aujourd’hui.»

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